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Vagina Week: Guest Editor Feature

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Vagin: L’histoire Anonyme 

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Il est là. Tapi dans l’ombre, comme honteux de son existence. Caché par une jupe, une robe, un pantalon qui le font disparaître. C’est plus facile comme cela. Dissimulé, évoqué à demi-mot ou dans un murmure, à cause d’une pudeur extrême. Venue d’où ? De nulle part? Des stéréotypes? De l’éducation? De la société? Personne n’aime entendre son nom, encore moins le lire, et surtout pas le prononcer.

Ce n’est pas un gros mot pourtant. Pas une insulte. Un peu pragmatique, certes, mais pas vulgaire ni sale. Un pauvre petit mot scientifique qui tente de décrire quelque chose dont on ne parle pas. Innocemment insolent, polémique sans le vouloir,  pour des gens voulant l’arracher de son cocon – le champ lexical de l’anatomie –  pour l’exposer et l’accuser dans des débats interminables. Le mettre à nu. Cependant, cela ne le dérange pas. Car il aime qu’on parle de lui, ce mot, il aime que l’on arrête de fermer les yeux obstinément sur sa réalité et ses combats.

Il décrit tellement de choses. Un aspect strictement biologique, une dimension symbolique de la dualité de celles à qui il appartient. Sa force et sa fragilité. Pouvant donner la vie et pourtant si souvent violé et stigmatisé. Plaisir et douleur. Considéré comme une marchandise, presque jamais revendiqué,  et pourtant tellement important. Objet à la fois de convoitise et de dégoût, il voudrait crier. Crier les offenses qu’il subit et cette catégorisation stupide qu’il induit, ces représentations qui divisent tant de gens.

Ces blessures silencieuses pour lesquelles il faut s’époumoner. Il faut parler, parler, parler de ce vilain mot qui dérange. Ou des sympathiques surnoms, sensément affectueux mais en réalité dégradants, qu’on lui a donnés au cours du temps. Un mot qui fait rire, sursauter ou du moins qui fait sourire. Ce petit mot de 5 lettres qui fait peur et qui est jaloux de la popularité de ce démagogue d’autre mot, qui lui aussi définit une partie intime (certes plus visible) et qui est pourtant, partout. De ce mot avec lequel il partage les lettres i et n, mais qui veut garder son empire hautain dans les représentations sociétales. Jaloux de cette distinction entre eux, de cette institutionnalisation qui fait de cet autre mot pédant un mot courant dans une conversation, ne gênant plus personne.

Lui, est à l’écart. Rejeté, il est « mauvais goût », seulement utilisé par les médecins et ces intervenantes qui font rougir et glousser tous les collégiens pendant les séances d’information sur la contraception. Victime de sa sulfureuse réputation, il est réduit au silence.

Défini par une absence ? Pourtant, il est bien présent. La différence est là. Dans les chromosomes, dans l’anatomie féminine. Constitutif d’une identité, qui risque à la fois une discrimination et des tentatives de domination des deux côtés.

Mais ce mot et ce qu’il désigne  est à moi. Il est à moi parce que je suis une femme et que j’en suis fière. Mais il vous appartient à vous aussi, qui que vous soyez. Il vous appartient de continuer à le rejeter, comme une idée noire que l’on veut oublier ou une amertume que l’on essaie d’effacer avec ces termes enjolivés que l’on doit au politiquement correct.  Le rejeter parce qu’il représente une partie spécifique d’un combat pour l’égalité et risque d’exclure involontairement. Mais vous pouvez aussi le revendiquer, comme l’étendard d’une lutte pour protéger ses droits, ses fragilités, ses devoirs. Vous pouvez vous l’approprier, ce mot, ou ce qu’il désigne, ou les deux même, vous êtes libres.

Mais arrêtez, s’il vous plaît, d’avoir peur. Je n’ai pas peur de dire ce mot. Ce mot si controversé, ce mot qui cause des polémiques et suscite des réactions pudiques et outragées. Oui, je vais le dire, car je n’en ai pas peur.

VAGIN.

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