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Poetry Prayer © Mahmoud

 

Before the light notices, tel est le nom de la pièce. Chaque répétition débute avec le même cérémonial : les enfants se prennent par la main et récitent les yeux fermés Sabra et Chatila du poète Palestinien Mahmoud Darwich. La personnification du quartier de Sabra en petite fille – elle pourrait avoir leur âge – est établie dès le premier vers : Sabra, une fillette dormant et les hommes partis aux lointains. “Parfois je m’arrête pour vérifier qu’ils connaissent bien leur leçon,” rit Mahmoud. Le grand auteur palestinienet l’enfant de Chatila partagent bien le même prénom, mais également leur goût pour la poésie. Son idole, Mahmoud, l’a approché, une fois. Celui-ci était venu réciter ses vers au camp de Chatila. Âgé de sept ans à l’époque et accompagné d’un parent, le petit fan était arrivé tôt pour gagner le premier rang. “Mon père m’en a beaucoup voulu. J’étais assoiffé durant tout le récital et ne pouvais tenir en place, lui suppliant de me trouver de l’eau”. Son père avait attendu la fin de l’événement pour s’avancer vers la scène que le poète venait de quitter pour s’emparer de la bouteille d’eau à demi entamée pour la tendre à son fils. C’est ainsi que l’enfant but à la même source que son idole. Il aime penser que c’est depuis ce jour qu’il a trouvé l’inspiration pour écrire à son tour. Celle-ci ne l’a pas quittée depuis quatorze ans.

A picnic in Chatila downtown © Mahmoud

 

Malgré la chaleur de juillet et août, la troupe se retrouve trois matins par semaine pour répéter. La représentation aura lieu le 17 septembre, jour de la commémoration des massacres de Sabra et Chatila de 1982, au sein même du camp où ils ont été commis. Des officiels seront présents. Cette pièce, Mahmoud en est l’auteur, le directeur et le metteur en scène. Elle débute avec une partie de cache-cache : trois enfants cherchent Amal (“Espoir” en Arabe, un prénom courant au Moyen-Orient), le quatrième joueur. “J’ai choisi cette approche car les enfants endurent beaucoup, mais ils sont en mesure d’impacter leur propre futur”. Le choix d’une partie de cache-cache n’est pas anodin. En 1982, le père du jeune réalisateur était un adolescent de Chatila. Il échappa aux massacres, “ un des pires de l’histoire moderne”, en se cachant toute la nuit dans une carriole à fruits. “Il est un survivant, de facto un des meilleurs de sa génération en cache-cache…”.

Pour Mahmoud, cette pièce est un humble cadeau à son peuple, sa participation au devoir de mémoire. “Je me sens connecté à cet endroit (Chatila) que les martyrs et moi partageons… Je leur suis reconnaissant et je leur dois mon inspiration”. C’est bien pour eux que les enfants joueront le 17 septembre.

Feminist actress © Mahmoud

 

Les enfants prennent leur rôle et le projet très à coeur.

“Je peux voir la Palestine dans ma tête” s’est enthousiasmé Yamen, un des acteurs principaux, après avoir écouté les vers de Sabra et Chatila. “De quoi ça a l’air ?” lui a demandé Mahmoud. “Plus beau que le camp et plein de vert”.

Hamoudi est le plus jeune mais bien le plus dynamique. Sa passion contagieuse pour son rôle suffit à faire aimer la pièce. Le troisième mousquetaire se prénomme Hassan. Il rêve de retourner en Palestine avec son grand-père, parce que sans lui, le retour perdrait tout son sens.

 

Portrait du metteur en scène

“Mes deux idoles sont mortes la même année : l’humoriste George Carlin et Mahmoud Darwich”. Si 2008 est une année de deuil pour Mahmoud, 1929 est une année d’allégresse, marquant la naissance de ses deux autres idoles, le musicien Chet Baker et Yasser Arafat. Sa passion ? Le jazz. Y convertir tous les cafés du camp, telle est la mission qu’il s’est fixée. Son enceinte sous le bras, il va de café en café pour tenter de convaincre les bartenders de substituer sa musique favorite à la musique traditionnelle. Certains font la sourde oreille à son prosélytisme musical. “Tu sais combien de martyrs sont morts pour nos musiques palestiniennes ? Maintenant cite-moi un seul mort pour la tienne ?” s’est une fois emporté un patron de café. Il se refuse toutefois à changer de disque.

Quelquefois, quand Mahmoud va boire un café palestinien – dont la recette comprend un ingrédient secret, malgré tout mes efforts pour le percer à jour, le mystère reste entier – il entend jouer la trompette de Chet Baker.  Il suspecte cependant le garçon de café de guetter son arrivée et changer de morceau juste à temps pour lui faire plaisir.

Preaching mahmudism ©Mahmoud

 

Je suis du regard un poisson noir tacheté très élégant. Il a de longues nageoires qui lui donnent l’air d’avoir enfilé un pantalon “pattes d’éléphant”. La grande classe. Celui-ci mérite définitivement le premier rôle. Avec Mahmoud, nous parlons de tourner un reportage animalier. Aussi, en bons directeurs de casting, nous observons attentivement la population de l’aquarium du Luna’s village, situé dans une petite rue du quartier jeune et dynamique de Hamra. Toutefois, notre reportage devra attendre, le jeune réalisateur a d’autres projets plus urgents en tête. Etudiant en cinéma à Beyrouth, il compte achever son premier film avant la fin de l’année. Son titre – Le Messager – n’est pas définitif. Et puisque c’est son message, je préfère vous le transmettre tel quel :

Une quête personnelle d’identité, tel était le moteur initial de ce film. Aussi, j’ai commencé à rencontrer d’autres Palestiniens. Qu’est-ce qu’être Palestinien ? Nous nous demandions si nous pourrions un jour retourner au pays. Le manque est permanent : le camp est-il ma maison (“home”) ou mon exil ? Je continuais mes recherches et par chance j’ai rencontré Maryoma, une Bengalaise dont le travail consiste à récolter des bouts de métal dans les déchets. Nous avons commencé cette journée ensemble. Puis Khaled, un enfant Syrien d’Alep qui travaillait à ses côtés nous a rejoint. Je nous voulais égaux. Aussi, une simple caméra est utilisée. Ni équipe de tournage, ni trépied. Seulement moi et la caméra pour assurer une conversation normale avec tous. La passer à Khaled et Maryoma leur permet de devenir cinéastes et de montrer leur propre conception du camp. La musique jazz permet d’exprimer de nouveaux moyens de révolution, pour tenter de répandre l’idée de résistance indirecte et pacifique pour notre droit au retour. Quant aux acteurs, j’ai choisi Maryoma et Khaled au lieu de Palestiniens car nous pouvons tous, un jour, être amenés à être concernés par l’exil. La quête de soi, elle, est une question universelle”. Le plus beau retour que Mahmoud reçut sur son film lui vint d’un enfant âgé de 8 ans qui commenta que c’était la première fois qu’il voyait sa maison “belle et claire”.

Maryoma Peace be upon Her © Mahmoud

 

Son rêve, ouvrir une école de cinéma, un cinéma et un club de jazz au sein du camp. “Je n’aurai ainsi plus besoin d’aller convaincre les petits bars traditionnels de troquer leur musique palestinienne pour la trompette de Chet Baker”.

La pièce a bien été jouée ce lundi 17 septembre 2018 devant une audience compacte avant d’aller rendre hommage aux victimes au mémorial. Un visiteur étranger a proposé de financer la pièce pour qu’elle puisse être jouée dans de meilleures conditions.

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Amandine Hess

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