À l’ère du nucléaire et de la technologie, il peut paraître facile de trouver l’armée obsolète, dépassée. Pourquoi envoyer des soldats sur place, alors qu’on peut envoyer des drones plus rapidement, sans avoir à annoncer à une famille la perte d’un de ses membres dans une mission obscure de l’autre côté du globe ? Pourquoi ne pas remplacer les humains par des robots ? Pourquoi ne pas démanteler nos forces armées alors que les armes nucléaires permettent qu’un conflit soit terminé avant même qu’il soit commencé ?
“Si vis pacem, para bellum” (“si tu veux la paix, prépare la guerre”) : cette locution latine peut sembler brutale, mais elle anime notre défense nationale depuis toujours. Si on veut conserver la paix dans notre pays et être en capacité de porter secours à nos alliés, il faut que le belligérant, quel qu’il soit, sache qu’il encourt de graves préjudices s’il porte atteinte à la sûreté nationale ou à notre territoire. Outre la préparation de la guerre, “l’armée s’inscrit aujourd’hui plus que jamais dans le dispositif de sécurité intérieure, aux côtés de la police et de la gendarmerie nationale, face à une menace terroriste prégnante et diffuse” explique le Général Olivier Kim lors d’une conférence à Sciences Po novembre dernier.
La technologie ne remplacera jamais l’homme. Tout d’abord, tous les conflits ne peuvent pas être résolus par ce que le Président Trump appelle le “carpet bombing”, c’est-à-dire réduire son ennemi à néant grâce aux bombes, qu’elles soient nucléaires ou non. Tout d’abord, une bombe n’a pas d’œil, ni sentiment. Que vous soyez un rebelle armé qui compte se battre jusqu’à la mort ou un esclave de ce dernier, aucune différence ne sera faite. La majorité des conflits ne peut être résolue à coup de bombe nucléaire. Envoyer une tête nucléaire sur le fief de Daech ne les arrêtera pas, et aura des conséquences irréversibles à la fois pour l’environnement, pour l’économie, et surtout pour les civils. Le même argument s’applique pour les développements technologiques. Une arme qui choisit seule ses cibles sera forcément problématique, nul besoin de voir Terminator pour s’en rendre compte. Une arme dont l’opérateur est dans un fauteuil à plusieurs milliers de kilomètres est guidée par une personne ne connaissant pas les conséquences réelles de son action ni le terrain qui les subit. Déshumaniser l’armée, c’est retirer l’humanité des interventions militaires, c’est prendre le risque que tous, ennemis et civils, périssent comme s’ils étaient les mêmes.
Certes, le facteur humain de l’armée peut être critiqué. La vie d’un soldat ne vaut pas moins qu’une machine, et il est certainement préférable que ce soit un drone qui soit abattu plutôt qu’un militaire. Les soldats ne sont pas toujours fiables non plus, et restent des humains avec des défauts pouvant commettre des erreurs, voire des crimes. Cependant, ce sont des professionnels, formés au terrain sur lequel ils interviennent, avec des sentiments. Ils sont volontaires et physiquement capables, et par-dessus tout, ils savent faire la différence entre un enfant innocent et un rebelle armé, une différence que tous les algorithmes ne sauraient faire de manière adéquate. L’humanité de ces soldats est ce qui rend leur présence nécessaire et leur perte douloureuse.
L’armée rassure, protège. C’est un symbole national, à la fois d’unité, d’égalité et de puissance. Les forces armées sont un symbole de la capacité d’un Etat à se défendre, comme l’Histoire l’a montré : les sanctions après-guerre contiennent toujours une réduction des effectifs militaires. L’armée est aussi un facteur d’intégration : peu importe les diplômes, les origines, les qualifications, un caporal reste un caporal ; c’est ce que le Général Kim nomme “le terreau du ciment social”. Ce brassage social permet à tout le monde de devenir un acteur de la sécurité nationale, où seuls le mérite et la bravoure importent.
Dans le contexte actuel, l’armée est importante, car c’est une force polyvalente ; réduire les missions aux interventions extérieures serait une erreur. Tout d’abord, après les attentats qui ont sévi en France depuis 2015, l’armée est en appui aux forces de police et de gendarmerie. Ces dernières ne peuvent tout gérer devant le nombre important de menaces, et l’armée sert donc de béquille. C’est aussi un appui durant les catastrophes naturelles, durant lesquelles les militaires sont déployés pour assurer la sécurité des victimes et après lesquelles ils s’assureront de l’ordre et de la reconstruction du territoire concerné.
Même s’il est possible de remettre en cause certaines opérations extérieures, il ne faut pas oublier que bon nombre d’entre elles concernent la formation de forces étrangères qui luttent contre le même ennemi. Par exemple, l’apport de l’armée française aux forces maliennes sur la logistique fut indéniable pour permettre au gouvernement de conserver la mainmise sur son territoire. L’attaque au couteau de l’individu devant le Louvre aurait pu toucher un ou plusieurs civils avant qu’il soit maîtrisé. Le nombre de victimes de l’ouragan Irma aurait pu être plus lourd.
Alors certes, il est possible d’imaginer un monde sans conflit, sans menace, sans catastrophe naturelle. Tout le monde y aspire, mais il faut rester réaliste. Nous avons besoin de notre armée, en ce moment plus que jamais. Il faut la dissocier des décisions politiques qui dirigent ses interventions, et la dissocier des crimes qui ont pu être commis par une infime minorité de ceux qui la servent. Avant tout, l’armée est ici pour servir la France et les français. C’est pour notre sécurité qu’elle existe, c’est pour nous que des hommes et des femmes passent leur vie à servir, et prennent le risque de ne plus jamais rentrer à leur domicile pour que le nôtre soit sécurisé.
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