Par Aliénor Pastré
A moins d’un mois des fêtes de fin d’année, le deuxième plus gros événement commercial de l’année fait son retour. Le Black Friday vient une nouvelle fois marquer le début des achats de Noël et le retour des rues commerciales remplies de consommateurs en quête de bonnes affaires.
Cette année, plus que jamais, ces derniers viennent se ruer sur les promotions en raison de l’inflation en France et dans le monde. En effet, l’entreprise britannique PricewaterhouseCoopers, spécialisée dans des missions d’audits, estime que 70% de la population française va participer aux campagnes promotionnelles du Black Friday en 2022. Acheter lors des promotions du Black Friday permet ainsi de faire des économies sur les cadeaux de Noël.
Afin de mieux comprendre l’ampleur et les dérives de ce phénomène commercial international, il faut d’abord se replonger dans le contexte de sa création.
De la création du Black Friday aux États-Unis à sa propagation dans le monde
Originaire des États-Unis, le Black Friday est, peu à peu, passé d’un évènement se déroulant le quatrième vendredi du mois de novembre, lendemain de Thanksgiving, à une fête commerciale durant plus d’une semaine. Cette transformation est intervenue au cours des années vingt ou Roaring Twenties marquant le début d’une époque d’abondance et de fêtes. Alors que l’économie américaine commence sa période d’essor, la célèbre marque New-Yorkaise Macy’s lance sa parade arborant des figures commerciales dans les rues de la ville, faisant ainsi sa renommée.
L’origine du nom, quant à lui, génère plusieurs hypothèses. Il y a néanmoins une version plus courante et plausible selon laquelle le Black Friday est une expression utilisée par les policiers de Philadelphie. Elle leur servait à décrire le trafic routier engorgé du lendemain de Thanksgiving qui, chaque année, réunit les familles américaines.
C’est seulement dans la période d’après-guerre que le phénomène s’est généralisé aux États-Unis avant de progressivement faire son apparition en Europe, notamment au cours des années 2010. Grâce au e-commerce, le Black Friday a pu se propager rapidement dans le monde. Les entreprises gagnantes de la mondialisation à l’image d’Amazon ont ainsi pu étendre leur marché et ont fait du Black Friday le second pic de ventes de l’année du haut de ses 6 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
L’ampleur du Black Friday en chiffres
Afin d’avoir un aperçu de l’ampleur du Black Friday en France, la société Fox Intelligence a réalisé une étude comparative entre les années allant de 2017 à 2020. En raison de la crise sanitaire de 2020, l’étude montre que l’édition 2020 du Black Friday a démarré plus tôt que les années précédentes comme le met en évidence le graphique ci-dessous. Un autre fait important souligné par ce graphique montre l’importance du e-commerce et d’internet dans la part du chiffre d’affaires du Black Friday. Partant du principe que les acheteurs ne pouvaient pas se rendre dans les enseignes, le Black Friday aurait dû être freiné mais les chiffres montrent le contraire.
Avec un budget moyen de 286 euros dépensés par une personne pendant le Black Friday, l’année 2022 devrait marquer une nouvelle fois un record, selon PricewaterhouseCoopers. Sans surprise, les géants de la technologie comme Amazon ou Apple figurent parmi les entreprises faisant le plus gros volume de chiffre d’affaires. Parmi les achats les plus prisés, beaucoup sont des produits ‘non-essentiels’ avec en tête de fil les jeux vidéos et les jouets, comme démontré par le tableau ci-dessous. Alors que les tendances montrent que les femmes font en moyenne plus d’achat en temps normal, la singularité du Black Friday montre que les hommes sont de plus gros consommateurs à cette période. Cet écart s’explique par le fait que les produits de technologie sont, en général, achetés par des hommes.
Les dérives commerciales
Devant les chiffres gargantuesques du Black Friday, il est impossible de ne pas penser aux conséquences de la production de telles quantités de biens de consommation. Le Black Friday vient se positionner en tant que symbole de la surconsommation. Cet événement est à la fois pointé du doigt pour l’impact écologique alarmant qu’il implique et de part le fait qu’il dénature le principe de nécessité lors d’un achat.
Elisabeth Borne, alors Ministre de la Transition écologique et solidaire, avait alerté en 2019, sur la chaîne BFM business, des dangers de la “frénésie de consommation” poussée par le Black Friday. La perte de la vision utilitaire provoque le comportement d’achat compulsif avec le plaisir, et même le besoin, d’acheter pour acheter. A titre indicatif, le Black Friday a provoqué onze morts aux États-Unis entre 2006 et 2019 en raison de bousculades ou d’accidents.
En raison de ces abus, le Black Friday se heurte à de plus en plus de contestations. Ces dernières années, plusieurs protestations se sont développées, comme des boycott à l’image du buy nothing day. En tête des mouvements, les groupes écologistes Youth for Climate et Greenpeace par exemple, viennent dénoncer le gaspillage et la surconsommation. Chaque année, lors du Black Friday, ces groupes organisent des manifestations et des boycotts dans les entreprises. En 2019 avait eu lieu des protestations en Allemagne dans les locaux d’Amazon, à Madrid, à Tokyo ou même au Royaume-Uni avec le jeu de mot “buy nowt friday”, combinaison des mots “now” et “not” signifiant respectivement “maintenant” et “pas” .
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Malgré les efforts des groupes dénonçant le Black Friday, l’impact de ces revendications reste minime et loin des attentes d’une réelle remise en cause de la société de consommation. Cet événement reste ancré dans les sociétés, en particulier celles très intégrées à la mondialisation. Le Black Friday n’a cependant plus aucune ressemblance avec son but original qui était de simplement marquer, le temps d’une journée, le début de la période de Noël.
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