Cette semaine, je suis choqué par l’adaptation de la vie de Napoléon Ier au grand écran, mais pas pour les mêmes raisons que le reste de la presse.
Alors que les grands critiques français du cinéma dénoncent « l’aberration » des imprécisions historiques et le regard critique du film sur le mythe napoléonien, vous serez davantage dérouté par le portrait de sa personne.
Anxieux, perturbé, et franchement pervers, le Napoléon incarné par Joaquin Phoenix ne ressemble guère au Napoléon qui franchissait les Alpes à dos de cheval – ce qui relève aussi d’une imprécision historique, mais soit.
La plupart des critiques de ce film ciblent effectivement ces imprécisions comme la plus grande déception de l’œuvre : en sortant de la projection du film, un vieil homme prétendant être historien m’a confié que « la représentation de la révolution française [dans le film] était grotesque ». Cependant, tandis que certaines scènes témoignent clairement d’une forte liberté artistique, cela vous marquera moins que l’enchaînement rapide des évènements historiques.
En effet, tout sciences piste aura compris qu’il faille absolument éviter l’effet « catalogue » dans son argumentation. Ridley Scott a clairement oublié cette règle et s’est permis de condenser 30 des années les plus turbulentes de l’histoire européenne en seulement 2h 37min.
Ce qui sauve la mise pour le grand réalisateur, ce sont ces majestueuses scènes de batailles, tournées presque sans écran vert. Vous y trouverez sans faille l’ampleur et la violence auxquelles vous vous attendiez.
Autre point contentieux de la sortie de ce biopic, l’étrange représentation de la relation amoureuse entre l’empereur et sa première femme Joséphine. Nombreux sont ceux qui crient tout leur désarroi face à la place que prend leur amour dans l’intrigue, y compris le fameux historien que j’ai rencontré à la sortie de la salle.
A ce grand débat, je réponds simplement : à quoi vous attendiez-vous ? Ayant choisi de représenter toute la carrière militaire et politique de Napoléon, il fallait nécessairement au scénariste (David Scarpa) un fil conducteur facile à repérer. Si vous souhaitez retracer fidèlement les soubresauts de l’épopée napoléonienne, allumez Arte pour voir un énième documentaire sur le sujet, ou relisez vos notes de la troisième session du « Long European Nineteenth Century ». C’est Hollywood, bordel !
Ce film manque clairement de profondeur dans son scénario, et aurait bien fait de se concentrer sur une période plus précise du règne de Napoléon Ier. Pour autant, le film vaut plus que ce que la presse lui a attribué de mérite. Bien qu’il soit déroutant de voir Napoléon construire et déconstruire un des passages les plus illustres de l’histoire française dans la langue de Shakespeare, il est impératif d’apprécier les réussites de ce film.
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