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Fin septembre 2023, le président de la République, Emmanuel Macron, a déclaré sur les plateaux de télévision le retrait des troupes françaises au Niger, d’ici à la fin de l’année. Cette annonce vient confirmer la demande de la junte nigérienne qui a pris le pouvoir suite au coup d’État du 26 juillet 2023. Ce changement de cap marque une nouvelle phase de l’intervention française dans la région du Sahel. Après les coups d’État au Mali et au Burkina Faso en 2021 et 2022, suivis de près par celui au Niger, les objectifs de l’opération militaire française Barkhane sont désormais compromis. 

En 2022, l’opération Barkhane était limitée à la Mauritanie et au Tchad avant d’être finalement dissoute le 9 novembre de la même année. Barkhane était à l’origine le fruit de l’alliance du G5 Sahel formé en 2014 par la Mauritanie, le Mali, le Niger, le Burkina Faso et le Tchad, autour du soutien militaire français. L’opération visait à lutter contre la menace terroriste dans la région. Cependant, les résultats mitigés ont affaibli la présence de la France dans la région. Le changement de pouvoir soudain dans plusieurs de ces pays à considérablement impacté les intérêts des pays sahéliens. 

 

Une fracture socio économique persistante 

 

La région du Sahel est caractérisée par une extrême pauvreté, à l’image du Mali qui est aujourd’hui considéré comme un des pays les plus pauvres au monde par la Banque Mondiale. Les pays du Sahel sont marqués par une forte croissance démographique mais aussi par un manque de ressources et d’opportunités économiques. Ainsi, le taux de chômage y est très élevé et la population en demande croissante d’emploi. La corruption y gangrène de surcroît les institutions politiques. Les perspectives professionnelles y sont limitées, et le mécontentement de la population, grandissant.

 

La récente indépendance de ces états explique la difficulté à ancrer des institutions démocratiques qui perdurent au sein du territoire. Le principal obstacle qui vient concurrencer les institutions politiques est l’armée. Durant le processus d’indépendance des années soixantes, l’armée a joué un rôle puissant dans la transition des nouveaux États. Aujourd’hui, elle maintient une place importante dans la société de ces cinq États, comme le révèle la succession de coups d’État militaires entre 2021 et 2023. 

 

La lutte pour le pouvoir 

 

Un autre fondement à l’origine d’une potentielle fragilité étatique : son incapacité à contrôler son territoire. C’est le cas au Mali où le groupe indépendantiste MNLA (Mouvement Nationalde Libération de l’Azawad) s’oppose au gouvernement basé dans la capitale, au Sud. La région de l’Azawad au nord du Mali est considérée comme non contrôlée après la déclaration d’indépendance unilatérale du MNLA en 2012

 

Les plus grandes menaces pour la sécurité restent les groupes terroristes internationaux. La région regroupe la plupart des groupes terroristes que l’on connaît aujourd’hui : Boko Haram à la frontière du Niger et du Tchad, des groupes affiliés à Al-Qaïda en Mauritanie et au Mali, notamment Ansar Dine, et des groupes affiliés à l’État Islamqiue dans la région des “trois frontières” entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Cette dernière région représente l’espace le plus difficile à contrôler pour les États. Situé à l’Est de Niamey, capitale du Niger, l’espace est très impacté par la contrebande et le terrorisme. 

Carte des groupes islamistes militants actifs en Afrique, Centre d’Études Stratégiques de l’Afrique

 

Soutien ? ou ingérence internationale ?

L’intervention française au Sahel a été lancée en 2014 suite à la formation du G5 Sahel. Malgré cet accord officialisé par un mandat de l’ONU, l’intervention n’a pas toujours été perçue d’un très bon œil par la population, considérant cette présence étrangère comme une forme de néocolonialisme. 

 

L’objectif principal était de rétablir la sécurité pour permettre une société plus prospère pour la population locale. Néanmoins, d’autres motivations officieuses ont pesé dans la balance. La présence française et européenne dans la région a été évaluée comme permettant de limiter les flux migratoires par les routes maliennes et nigériennes. Qui plus est, la France a une production énergétique reposant essentiellement sur le nucléaire, dépendant de grandes quantités d’uranium, près de 8 000 tonnes par an, qui viennent notamment des mines de l’Aïr au Niger. Sans la présence militaire française, les sociétés exploitant les ressources du pays, comme Orano, ne disposent plus de garanties de sécurité. La France exploite aussi les ressources en pétrole de la région. Encore une fois, c’est le Niger, à la frontière avec le Tchad, qui concentre une grande réserve d’or noir dans le bassin du Termit

Carte de l’opération Barkhane en 2020, Ministère des Armées

 

Un nouvel allié pour les États militaires

 

A la suite du coup d’État nigérien, la junte au pouvoir et la population se sont mobilisés pour demander le retrait de l’opération Barkhane du pays. De nombreuses manifestations contre la présence française et pour le renvoi des diplomates ont fait comprendre aux autorités françaises le désir de voir les troupes françaises se retirer du territoire. 

 

Sans la France, les juntes du Mali et du Burkina Faso se sont tournées vers de nouveaux alliés pour continuer à garantir une présence militaire dans leur pays. Les nouveaux gouvernements ont ainsi sollicité l’aide de la société paramilitaire russe Wagner. Seulement, le groupe Wagner a récemment été accusé de commettre de nombreuses exactions en Afrique. Avec la complicité de l’armée malienne, Wagner fait régner la terreur sur la population civile, sans distinction. 

 

Malgré l’augmentation du nombre de morts due à des actes terroristes, le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont annoncé vouloir former une coalition en cas d’intervention extérieure sans leur accord, notamment suite à la menace de la Cedeao (Communauté des pays d’Afrique de l’Ouest) d’intervenir pour renverser la junte nigérienne en 2023. Il semble ainsi que ces trois pays sont décidés à refuser une nouvelle intervention occidentale dans un futur proche. Même si le G5 Sahel n’est pas encore dissous, la fin de cette alliance semble certaine. 

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Aliénor Pastré

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