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Le phénomène culturel Barbenheimer : renaissance du cinéma le temps d’un été ?

By October 7, 2023No Comments6 min read

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Impossible d’être passé à côté à moins de vivre au fin fond d’une grotte ou à Rochefourchat, dont la population n’a pas encore dépassé les deux habitants. Les cinéphiles étaient en exaltation durant ce mois de juillet et l’euphorie a même largement dépassé les habitués des sombres salles de cinéma. 

 

Ce n’était qu’un 19 juillet plutôt classique, la chaleur était, certes, présente, mais chacun réfléchissait déjà intérieurement au film qu’ils allaient visionner à l’heure de sa sortie : Barbie ou Oppenheimer.

 

Les fans assidus du réalisateur américano-britannique Christopher Nolan, l’homme qui serait capable de retourner le cerveau d’un gourou, attendaient avec impatience la sortie de son nouveau long-métrage Oppenheimer dont le titre éponyme nous révèle instantanément son sujet. 

 

Adaptation de la biographie Robert Oppenheimer : Triomphe et Tragédie d’un génie de Kai Bird et Martin J. Sherwin (2005, disponible en français chez Cherche Midi, 28 euros), également Prix Pulitzer de l’année 2006, le film retrace l’histoire du «père de la bombe atomique» et nous plonge dans les méandres de son esprit, en plein conflit entre morale et éthique, et le tout sur fond de la genèse de la guerre froide. Tourné avec la pellicule IMAX en partie en noir et blanc, ce film novateur cumule un budget de 100 millions de dollars, ce qui reste toutefois faible en considérant les précédents films de Nolan comme Tenet ou Interstellar.

 

Mais pour beaucoup, le dilemme était beaucoup trop grand. Ce 19 juillet 2023, l’égérie de Mattel faisait pour la première fois son entrée sur grand écran, et en taille réelle. Le film Barbie de Greta Gerwig avait aussi su attirer le regard du public, qui se demandait comment serait interprétée la poupée, certes, iconique mais stéréotypée à souhait. La réalisatrice américaine, qui s’était déjà faite remarquée avec Ladybird ou Les Quatre Filles du Docteur March, faisait donc face à un projet d’envergure où beaucoup l’attendaient au tournant. Il n’est pas nécessaire de mentionner que Ryan Gosling dans le rôle de Ken, avec son blond peroxydé et ses rollers fluorescents, a incité plus d’une quadragénaire à se rendre au cinéma le plus proche. 

 

Mais après quasiment deux heures de film, passant de la Mojo Dojo Casa de Ken à quelques discours féministes et d’acceptation de soi parfois un peu faciles, la grande majorité du public est sous le charme. Barbie est un succès mondial permettant à Greta Gerwig d’être la première réalisatrice à atteindre le milliard de dollars au box-office.

 

Les retombées économiques mais aussi culturelles du film Barbie sont particulièrement importantes. Mattel, producteur du film, surfe sur la vague, en proposant de nouvelles poupées à l’effigie des personnages. Encore une fois, la réalité est rattrapée par la fiction : les poupées Barbie sont en rupture tandis que les Ken restent, seuls, au milieu des rayons. De plus, la bande originale du film est un large succès : le tube des années 2000 Barbie Girl, originellement interprété par le groupe Aqua, est bien évidemment repris au goût du jour par Doja Cat et Ice Spice sous le titre Barbie World. Les têtes d’affiche du film prennent aussi part au jeu, avec l’exemple de I’m Just Ken, interprété par Ryan Gosling lui-même ou encore la chanteuse Dua Lipa, apparaissant dans le film sous les traits de Barbie sirène. Le film Oppenheimer est, quant à lui, devenu récemment le biopic le plus rentable de l’histoire du cinéma, dépassant même Bohemian Rhapsody, la célébration du chanteur du groupe Queen, Freddie Mercury. En effet, le film atteint un total de 900 millions de dollars au box office.

 

Il n’était donc pas surprenant de se retrouver au milieu d’un duel au passage d’un couloir du cinéma : « Tu es team Barbie ou Oppenheimer ? ». Même sur Tik Tok ou Instagram, le phénomène « Barbenheimer » nous saute aux yeux, impossible de s’en défaire, l’algorithme est trop fort. Au final, au milieu de cette guerre des clans, nous sommes tous un peu perdus car la grande majorité du public a visionné les deux films. A l’issue de deux semaines de projection en France, Barbie était en tête avec quasiment 3 millions d’entrées contre, tout de même, plus de 2 millions pour Oppenheimer, ce qui n’est pas à avoir à rougir. 

 

Avec un mois de juillet qui comptabilise 18,4 millions d’entrées, les salles de cinéma françaises connaissent un regain amplement apprécié dans une industrie en perte de vitesse. Concurrencée par les plateformes de streaming comme Netflix, Disney+ ou Amazon Prime, la fréquentation des salles ne cesse de diminuer, exacerbant ainsi les inégalités entre films à gros et à petit budget, comme les films français. Ce retour étant par ailleurs dû à la parution de blockbusters américains, les critiques des défenseurs du cinéma francophone se sont faites virulentes. 

 

Ce phénomène révèle-t-il la fin des films indépendants ou de genre au profit de long-métrages hollywoodiens qui se renouvellent peu ? Se dirige-t-on vers une uniformité du cinéma qui en retirerait tout son attrait et sa beauté? Il est difficile de l’affirmer tandis que quelques habitués restent fidèles aux salles nous exposant les perles du septième art.

 

Zoé Frère

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