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By Santiago Robledo

On ne se rend compte de l’importance d’une chose qu’après l’avoir perdu.  Les américains le comprendront avec la décision du 14 Décembre de la Commission Fédérale des Communications aux États-Unis. Cette agence du gouvernement, dédiée à la régulation de l’utilisation de tous les moyens de communication et régulant les lois sur l’innovation technologique a décidé, sous la direction du nouveau président de la commission, Ajit Varadaraj Pai, d’abroger les décrets sur la neutralité du Net. Mais qu’est-ce que la neutralité du net et pourquoi sa disparition est extrêmement dangereuse pour les usagers, comme pour les start-ups et même pour certains pans de la société ?

 

La neutralité est un principe fondateur d’internet et a été, depuis sa popularisation dans les années 1990s, au fondement de l’innovation digitale : tous les usagers d’internet ont le même accès aux informations et aux sites internet à la même vitesse et tous les sites internet ont le droit de fournir le même accès à tous les usagers, les opérateurs fournisseurs d’accès à internet (FAI) n’étant que différents intermédiaires mais sujets aux mêmes normes.

 

Le gouvernement d’Obama avait fait voter des lois garantissant cette neutralité, elles empêchaient la discrimination de sites internet par les opérateurs. Les FAI ne pouvaient bloquer ou ralentir de sites d’internet que si ils étaient illégaux et ils ne pouvaient pas on plus créer une voie prioritaire d’accès à internet en laissant une voie lente à certains usagers. Mais dorénavant, d’autres conditions justifieront cette discrimination, notamment le forfait détenu par  l’usager.

Concrètement, il est possible maintenant pour les FAI de faire payer, sans doute au moyen d’un forfait “premium”, un supplément aux utilisateurs pour avoir accès à certains sites comme Facebook ou WhatsApp. De l’autre côté, les sites internet pourraient avoir à payer ces mêmes fournisseurs pour que leurs clients puissent accéder à leurs contenus.

 

Dans un monde aussi dépendant de l’internet, beaucoup seront prêt à payer n’importe quel prix pour avoir accès aux réseaux sociaux ou aux plateformes de streaming. Mais cette régulation polémique pose une autre question : faire payer les utilisateurs pour un service aussi élémentaire qu’internet ne risque t-il pas d’accentuer encore les inégalités ?

 

En effet, les personnes aux moyens plus limités n’auront pas le même accès au marché du travail en ligne, ce qui isolera immanquablement individus les plus démunis. Si cela s’appliquait aux télécommunications de l’information, cela deviendrait plus dangereux encore. Oui, c’est révoltant.

 

La France n’est pas encore menacée, après une annonce du patron de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’équivalent français de la commission fédérale des communications (FCC), qui a assuré qu’il n’y aura pas d’impact direct de la décision en Europe. Mais le problème n’en est que reporté, car la décision aux Etats Unis a ouvert la porte aux revendications des opérateurs et des FAI qui réclament plus de liberté. C’est bien plus problématique pour les pays moins développés. Effectivement, des pays d’Afrique ou d’Amérique du Sud qui qui commence à peine à développer un véritable système d’infrastructures numériques, se basent sur le modèle américain. Or, les entrepreneurs et start-ups dans les nouvelles technologies devront payer pour s’offrir un accès à internet efficace, coût qui leurs sera relativement beaucoup plus élevé que pour les premiers arrivés, les colosses de la Silicon Valley par exemple. Internet deviendrait ainsi une sorte de barrière à l’entrée d’un marché, alors qu’il avait vocation à en faciliter l’accès.

Les différents forfaits proposés par la compagnie portugaise MEO.

Certains pays, comme le Portugal, n’ont pas cette neutralité du net, et certaines compagnies de téléphonie commencent à proposer des forfaits pour avoir un accès prioritaire à certaines applications et certains sites internet. Petit à petit, les portugais doivent payer un supplément pour avoir bon accès à Netflix, Youtube ou Spotify.

 

La question est donc de savoir si l’on souhaite considérer Internet comme un bien public ou privé. La FCC le considère comme un bien privé et l’introduit donc sur le marché. Certains y sont gagnants, mais beaucoup sont perdants et cela crée des inégalités. Alors que si on considère internet comme un bien public, cette décision équivaudrait à faire payer les utilisateurs pour une électricité de qualité supérieure. Tous ceux qui payent auront de l’électricité mais seulement les premiums l’auront plus rapidement et plus efficacement, avec meilleur débit par exemple. Cette dérégulation va à l’encontre de l’idéologie révolutionnaire même d’Internet.

 

Il ne s’agit pour l’instant que de spéculations, et la seule conséquence à court terme sera la fin de la baisse des prix des forfaits aux États-Unis car le marché des télécommunications aux Etats Unis est un oligopole où l’on trouve notamment AT&T, Comcast ou Verizon. La décision ayant été très médiatisée, il sera impossible pour ces compagnies de changer du jour au lendemain leur forfaits sans attirer les foudres des usagers, des médias et l’attention des politiciens. Toutefois à long terme, il faudra rester attentif car les opérateurs vont sans doute tenter de manipuler leurs clients. La technique la plus utilisée est le « zero rating » qui consiste à proposer aux utilisateurs différents forfaits où certaines applications sont illimitées alors que sur d’autres forfaits, moins coûteux, ces application sont disponibles mais elles sont plus lentes, et les utiliser augmente la note internet totale de l’utilisateur.

 

Heureusement, des groupes activistes aux US comme l’association « Fight For the Future » se préparent à traduire en justice cette nouvelle régulation et à faire pression sur le congrès. Les procureurs des États de Pennsylvanie ou New York se sont dits être prêts à remettre en cause la décision.

 

Santiago Robledo, born in Colombia (the country – not the dual degree) and raised in sunny southern France, is now in rainy northern France as a first year student. He enjoys writing and all sorts of outdoor activities, despite social media and French pastries also taking a lot of his time. Thinking Out Loud runs once a month.

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