Par Amandine Hess
Vous avez aimé le light show sur la cathédrale de Reims cet été ? Alors vous allez adorer la Fête des Lumières de Lyon ! Le 8 décembre, la métropole s’illumine de mille feux. Un remède miracle face aux nuits de plus en plus longues.
Lumignons ou spectacle de son et lumière ?
La fête a changé d’envergure depuis son apparition en 1852. La lumière a bénéficié de la révolution électrique et gagné en puissance, en Watts.
Aujourd’hui, son éclat s’est échappé des petits lampions posées sur les rebords des fenêtres pour conquérir les façades des bâtiments historiques de la ville.
De Lugdunum, colonie romaine en Gaule chevelue, à la Ville des Lumières, le passé de Lyon se dévoile durant quatre nuits. Petit tour d’horizon des coups de coeurs du Sundial Press.
Cette année, l’amphithéâtre gallo-romain revisitait Balaha, une légende bouddhiste narrant l’histoire d’un cheval impossible à dompter. De véritables chevaux ont été parés de centaines de leds laissant apparaitre au milieu des ruines leur silhouette cabrée et luminescente. Des constellations étaient projetées dans les vestiges de gradins avant que ne s’en échappe un Pégase lancé au galop aux ailes enflammées. L’illusion était totale.L’existence des licornes et pégases n’appartient plus seulement au pays imaginaire pour le jeune public. La troisième nuit, une installation a pris feu sur le site de l’Antiquaille, nommé ainsi après la découverte des vestiges romains. Un spectacle pyrotechnique prévu au programme ? Le Balaha n’était pas le seul indompté, la lumière a bel et bien réussi à échapper au contrôle des hommes. L’incendie a toutefois rapidement été maîtrisé et n’a pas menacé le public, tenu à distance.
“La place des Terreaux mettra à l’honneur le 7e art lors de la Fête des Lumières 2017” soulignait le quotidien 20 minutes Lyon à propos de la projection Enoha. Un hommage rendu de “manière irrévérencieuse” au cinéma, confiait la créatrice Nathanaëlle Picot au journal local, art bien lié au passé lyonnais pour être l’oeuvre des Frères Lumières, en 1895. Petits et grands étaient transportés dans des scènes cultes du grand écran, projetées sur les façades du Musée des Beaux-Arts. La place s’est alors métamorphosée en salle de cinéma à ciel ouvert. L’occasion de se livrer à un blind test cinématographique et de voir qui des grands ou des petits en sortiraient vainqueurs. Le Parrain, films western ou James Bond ? C’était à vous de jouer ! Les plus cinéphiles d’entre vous auraient reconnu la première scène du spectacle, mais également première scène du cinéma : “La sortie de l’usine Lumière” tournée en 1895.
Le spectacle Unisson diffusé sur la cathédrale St-Jean et Météore sur la piscine du Rhône arrivent 3e ex aequo dans notre classement. Une implosion et une explosion.
L’“Objet Lumineux Non Identifié” de Météore filait à la fois violemment et élégamment au-dessus du fleuve avant de venir percuter les piliers de la piscine. Le fleuve et les vitres faisaient office de réverbère pour une explosion de lumière des plus grandioses. Malheureusement, cette installation n’a pu fonctionner tous les soirs à cause des intempéries. La météo était aussi imprévisible que le météore. Seule ombre au tableau, le son parvenait moins bien de l’autre rive. Par le silence des explosions dans l’espace, l’imprévu a finalement rendu la simulation encore plus réaliste que prévu.
Unisson valait les deux heures d’attente et les pieds écrasés par la foule. Spectacle psychédélique et musique électronique. Un show 3D sublime les dimensions de la cathédrale. Dans un jeu de construction-déconstruction de la façade gothique, les fragments de lumière s’assemblent méthodiquement avant d’imploser dans un délire confus.
Un métissage de tradition populaire, innovation technologique et scène d’expression artistique.
Tradition populaire
Retour aux origines. Nous sommes en 1852. Tout repose sur un contretemps. Si tout se passait comme prévu, une statue de la vierge en or devait être inaugurée le 8 Septembre, jour de la Nativité. Cette date était célébrée chaque année à Lyon depuis 1643 par les fidèles pour remercier Marie d’avoir protégé la ville de la peste. C’était sans compter sur la crue de la Saône et les intempéries qui repoussent la célébration au 8 décembre. Le jour j, pas de crue mais le temps n’est pas au beau fixe. Les Lyonnais refusent de reporter une nouvelle fois la date et déposent spontanément des lumignons aux fenêtres La Fête des Lumières est née.
Innovation technologique
Expérimentations étudiantes, artistes locaux mais aussi internationaux, et membres de LUCI (Lighting Urban Community International) coopèrent chaque année dans des projets de plus en plus grandioses. Le modèle s’exporte. Lyon a travaillé avec des villes telles que Bogota, Quito, Francfort ou plus récemment Shanghaï et Hong Kong pour l’organisation de leur propre festival des Lumières.
Scène d’expression artistique
La lumière devient un matériau travaillé par l’artiste, les édifices deviennent son support, et la ville entière se transforme en scène de spectacle.
Plutôt vin de messe ou vin chaud ?
Croyant ou non, chaque Lyonnais célèbre le 8 Décembre à sa manière : qu’on l’appelle Fête des Lumières ou Fête de l’Immaculée Conception, c’est l’occasion de célébrer.
Plutôt passant ordonné ou passager ?
Il y a deux façons de découvrir la Fête des Lumières, selon votre caractère.
D’un côté, le passant ordonné, carte à la main stabilotée et circuit planifié à l’avance. Il a lu le Top 5 la veille sur Radioscoop. Il connait son point de départ et son point d’arrivée. Il sait ce qu’il veut voir et ne pas rater.
Bonus : il peut anticiper pour éviter la foule et en voir bien plus.
Malus : il est moins surpris, et à tout planifier ce passant risque de rater les installations imprévues au détour d’une traboule (passage piéton et souvent insoupçonné à travers des cours d’immeuble, permettant de se rendre d’une rue à une autre).
De l’autre côté, le passager se laisse transporter. Il ne sait pas où il va ni à quoi s’attendre. La fête est plus expérience que programme. Il erre au hasard dans les rues et se laisse guider par les sons et lumières.
Bonus : la ville devient synonyme de labyrinthe et d’aventure. Joindre la batucada annuelle et danser sur les rythmes brésiliens au milieu de la foule et des premiers flocons (tout simplement maravilhoso!), prendre un troisième vin chaud ou encore s’élancer dans une folle bataille au centre d’un orchestre en costumes d’animaux ne perturbera pas son programme.
Malus : il risque de manquer les immanquable et d’être pris en otage par les “foules-files d’attente”.
Conseil : Allez-y deux soirs, un pour ne rien rater et un pour se laisser surprendre.
“Nous avons marché le long de la Seine qui n’est pas vraiment droite.
- Regarde, Momo, la Seine adore les ponts, c’est comme une femme qui raffole des bracelets.”
Rendons à César ce qui est à César, nous devons cette citation au grand (Lyonnais) Eric Emmanuel Schmitt dans le roman Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran.
Dans notre cas ce serait plutôt :
“Nous avons (beaucoup) marché le long de la Saône qui n’est pas du tout droite.
- Regarde, Danko, les arbres adorent les lanternes, c’est comme une femme qui raffole des boucles d’oreille.”
Pour finir, gardez en tête que le spectacle n’est pas seulement sur les façades, mais aussi dans les rues et aux alentours
Il ne faut pas oublier de prendre un verre de vin chaud à 2 euros chez celui qui aura fait preuve de la plus grande créativité pour vanter les mérites de son produit. La concurrence est rude pour les vendeurs de vin chaud ! Un stand tous les 50 mètres parfois puisque chacun peut en vendre exceptionnellement sans autorisation. Tout est permis pour se distinguer du voisin y compris entamer un karaoké sur du Claude François ou chanter le fameux “Chaud-chaud-chaud-cacao”. Y succomberez-vous ?
Les Lyonnais se mêlent aux 3 millions de visiteurs et découvrent ou redécouvrent la ville, dans une ambiance magique pour quatre soirées. Ce n’est pas qu’un spectacle. C’est une véritable expérience.
Retour aux sources
Pour certains, ouvrir la première case du calendrier de l’Avent marque le lancement du compte à rebours jusqu’au 25 Décembre. En gone que j’étais (“enfant” en Lyonnais) la Fête des Lumières annonçait le début des festivités. Nous attendions le 8 Décembre toute l’année. Pas besoin des premières cigarettes pour apprendre à manier les allumettes, les gones se doivent de savoir allumer les lumignons. De véritables apprentis pyromanes. Et il y avait le Papa qui criait depuis l’intérieur parce que la chaleur s’échappait par la fenêtre. Je considérais comme ma mission de garder les lumignons allumés jusqu’au matin. Je devenais veilleuse de nuit, étais de garde, faisais mes rondes. De fenêtre en fenêtre. En vain. Chaque année je m’endormais pour les retrouver éteints au petit matin. Mon beau lumignon ne ressemblait plus qu’à un vulgaire cendrier. Il ne restait de lui qu’un peu de cire fondue et un dépôt de cendre. Un passant inconscient aurait pu y laisser s’y mourir son mégot. De fascinée (beaucoup) à frigorifiée (surtout), je finissais la fête frustrée, affectée … et enrhumée.
Il y a de ces événements à ne pas louper, à écrire dans son agenda en lettres capitales et qui valent le détour pour une journée, un week-end, ou en l’occurence, une soirée. Le 8 Décembre en fait indéniablement partie !
Gardez bien les dates en tête pour l’année prochaine et celles qui suivent.
Kit de survie et conseils pratiques :
- Evénement GRATUIT.
- Tolérez la foule, le froid et les files d’attente dans la foule et dans le froid.
- Réservez votre logement plusieurs mois à l’avance, les auberges de jeunesse et Airbnb partent comme des petits pains, sachant que les tours opérateurs réservent 1 an à l’avance.
- Sacs à dos et bagages sont interdits, prenez un sac à main léger.
- Amis claustrophobes, soyez à 20 heures tapantes place des Terreaux ou place St-Jean, toutes deux prises d’assaut et difficilement accessibles. Vous assisterez ainsi à la première projection et éviterez les files d’attente interminables.
- Les restaurants sont pris d’assaut, privilégiez les kebabs ou stands de rue aux bouchons (restaurants lyonnais) qui mettront du temps à vous servir et vous feront rater le début du spectacle. Si vous ne voulez pas rater la cochonnaille lyonnaise, allez au bouchon à 18 heures pour être sortis à 20 heures.
- Transport : cherchez des billets SNCF ou OUIGO à l’avance pour trouver des bons plans ou prenez un aller-retour Reims-Lyon sur blablacar pour 70 euros.
- Informations utiles : métro et tramway gratuits le soir du 8 décembre seulement, et par conséquent bondés. Privilégiez un circuit à pied. Les autres soirs prenez un ticket de transport valable pour toute la soirée spécial Fête des Lumières.
- A savoir : en règle générale, le vendredi et le samedi soirs sont les plus bondés.
- Pour patienter d’ici l’édition 2018 de la fête voir : https://twitter.com/fetelumieres/status/928975733376110592
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